Statut du lanceur d’alerte : quelle protection pour le salarié ?
Selon un arrêt du 4 novembre 2020 de la Cour de cassation,un salarié ne peut se prévaloir du statut de lanceur d’alerte instauré par l’article L. 1132-3-3 du code du travail si les faits qu’il dénonce au moyen d’un enregistrement clandestin de l’employeur ne sont pas susceptibles d’être constitutifs d’un délit ou d’un crime.
Soc. 4 nov. 2020, FS-P+B, n° 18-15.669
Pour rappel, depuis la loi n° 2013-1117 du 6 déc. 2013, tout salarié est protégé s’il a dénoncé de bonne foi des faits susceptibles de constituer un délit ou un crime.
Cette protection est désormais prévue à l’article L1132-3-3 du code du travail relatif au principe de non-discrimination
Ainsi,
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, […] pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ».
En cas de litige, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu’elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à la déclaration ou au témoignage du salarié (C. trav., art. L. 1132-3-3).
Comme toute mesure discriminatoire, la mesure prise à l’encontre d’un salarié ayant relaté ou témoigné de tels faits encourt la nullité (C. trav., art. L. 1132-4).
La Cour de cassation est venue préciser ce régime dans un arrêt du 7 juillet 2021.
En l’espèce, pour rejeter les demandes du salarié tendant à la nullité du licenciement, à sa réintégration et au paiement de sommes subséquentes, l’arrêt, qui a estimé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, retient que la lettre adressée à la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations par le salarié est postérieure à la convocation de celui-ci à l’entretien préalable au licenciement, et que la concomitance des deux circonstances ne peut à elle seule établir le détournement de procédure allégué.
La Cour de cassation va venir casser l’arrêt jugeant que, sans rechercher si le salarié, qui soutenait avoir préalablement à sa convocation à un entretien préalable avisé sa hiérarchie des faits qu’il jugeait illicites et de son intention de procéder à un signalement aux autorités compétentes, ne présentait pas des éléments de fait permettant de présumer qu’il avait relaté ou témoigné de bonne foi de faits qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales et si l’employeur rapportait alors la preuve que le licenciement était justifié par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressé.
Cass. soc., 7 juillet 2021, n°19-25.754, FS-B
« 8. En se déterminant ainsi, sans rechercher si le salarié, qui soutenait avoir préalablement à sa convocation à un entretien préalable avisé sa hiérarchie des faits qu’il jugeait illicites et de son intention de procéder à un signalement aux autorités compétentes, ne présentait pas des éléments de fait permettant de présumer qu’il avait relaté ou témoigné de bonne foi de faits qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales et si l’employeur rapportait alors la preuve que le licenciement était justifié par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressé, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi principal du salarié, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ; »