Quelles sont les conséquences de l’absence de signature d’un solde de tout compte ?
Cass. soc., 14 novembre 2024, n° 21-22.540,
Dans cette affaire, la question portait sur les conséquences de l’absence de signature d’un salarié sur un solde de tout compte.
Il s’agissait d’un salarié qui avait été licencié pour motif disciplinaire.
Quelques années plus tard et après son incarcération, il avait réclamé devant la juridiction prud’homale le versement de diverses sommes au titre du solde de tout compte.
Il considérait que l’absence de signature sur le solde tout compte n’avait pas produit d’effet et que la prescription n’avait pas commencé à courir.
Dans un arrêt rendu le 24 novembre 2024, la Cour de cassation a jugé contraire à la décision de la Cour d’appel que le solde de tout compte non signé par le salarié n’a pas de valeur de preuve de paiement et n’a aucun effet sur le délai de prescription.
Ce délai ne commence à courir, ou peut être suspendu, uniquement en cas d’impossibilité d’agir résultant d’un empêchement légal, conventionnel ou dû à une force majeure.
La Cour considère que bien que le salarié ait été incarcéré, cette situation ne suffit pas à interrompre ou à suspendre le délai de prescription.
Cass. soc., 14 novembre 2024, n° 21-22.540, F-B
Argumentation de la Cour
« Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1234-20 et L. 1471-1 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, antérieure à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l’article 21 V. de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 :
4. Selon le premier de ces textes, le solde de tout compte fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail. Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature par le salarié, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.
5. Aux termes du deuxième, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
6. En vertu du troisième, les dispositions précédentes s’appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
7. Il en résulte que le solde de tout compte non signé par le salarié, qui n’a pas valeur de preuve du paiement des sommes qui y sont mentionnées, n’a aucun effet sur le délai de prescription qui ne court pas ou n’est suspendu qu’en cas d’impossibilité d’agir à la suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.
8. Pour déclarer recevable l’action du salarié aux fins de remise des documents de fin de contrat, en paiement des sommes mentionnées sur le solde de tout compte et de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l’arrêt retient que le solde de tout compte que le salarié n’a jamais signé en raison de son incarcération du 25 juin 2013 au 22 juin 2017, n’a produit aucun effet libératoire et qu’aucune prescription n’a commencé à courir.
9. En statuant ainsi, alors qu’elle constatait que la prescription de l’article L. 1471-1 du code du travail s’était appliquée à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° 2013-504 du 13 juin 2016 et que le salarié avait jusqu’au 16 juin 2015 pour engager toute action portant sur l’exécution et la rupture du contrat de travail, sans caractériser une cause d’interruption ou de suspension du délai de prescription, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette les demandes de dommages-intérêts présentées par M. [H] au titre du préjudice moral et du préjudice financier et en ce qu’il rejette sa demande en fixation de la moyenne mensuelle des salaires à la somme de 3 500 euros brut, l’arrêt rendu le 15 juillet 2021, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; »