Inaptitude et reclassement : priorité au dernier avis d’inaptitude
Dans un arrêt rendu le 6 mai 2015, la chambre sociale précisait le cadre de l’obligation de reclassement du salarié déclaré inapte.
En effet, en vertu de l’article L. 1226-10 du Code du travail, l’employeur doit proposer au salarié (déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment) un autre emploi approprié à ses capacités.
« Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise. » (L. 1226-10 C. tr.).
En conséquence et en application dudit texte, la cour de cassation jugeait que les aménagements de poste réalisés avant l’avis d’inaptitude ne permettent pas, à eux seuls, de conclure au respect de l’obligation de recalssement.
Les juges du fond doivent nécessairement analyser les actions, aménagements, transformations, mutations mis en oeuvre APRES l’avis d’inaptitude rendu par le Médecin du travail susceptible de comporter des préconisations, indications quant au reclassement du salarié.
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« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X…, engagée par la société Custom solutions en qualité d’opératrice de saisie dans le cadre de contrats à durée déterminée du 1er au 30 novembre 2003 et du 12 janvier au 13 février 2004, puis d’un contrat à durée indéterminée à effet du 20 février 2004, a été en arrêt de travail pour une maladie professionnelle à compter du 19 novembre 2004 ; qu’elle a repris son travail le 4 février 2008 dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique et a de nouveau été en arrêt de travail à compter du 14 avril 2008 ; qu’à l’issue de deux visites de reprise des 16 et 30 septembre 2008, le médecin du travail l’a déclarée inapte de manière définitive à la reprise de son poste de travail après étude de poste et des conditions de travail dans l’entreprise le 26 septembre 2008 ; qu’elle a été licenciée le 24 octobre 2008 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que contestant la régularité et le bien-fondé de son licenciement, elle a saisi la juridiction prud’homale ;
Sur les deux moyens du pourvoi incident de l’employeur :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de la salariée :
Vu les articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouter la salariée de ses demandes en dommages-intérêts en application de l’article L. 1226-15 du code du travail, l’arrêt retient, d’une part que l’employeur a respecté son obligation de reclassement, ayant déjà aménagé le poste de la salariée de façon ergonomique et son temps de travail dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique, d’autre part qu’aucun poste de standardiste ou d’agent d’accueil n’existait au sein de l’entreprise tel que préconisé par le médecin du travail dans son avis définitif d’inaptitude ;
Attendu, cependant, que seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement ;
Qu’en se déterminant comme elle l’a fait, en se référant à des démarches et aménagements antérieurs à l’avis d’inaptitude, et sans rechercher, comme il lui était demandé, si l’employeur avait, postérieurement au second avis du médecin du travail, mis en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que la cassation prononcée du chef de l’arrêt déboutant la salariée de ses demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse entraîne par voie de dépendance celle du chef de l’arrêt condamnant l’employeur à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts pour irrégularité du licenciement ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute Mme X… de sa demande en dommages-intérêts en application de l’article L. 1226-15 du code du travail et condamne la société Custom solutions à payer à celle-ci la somme de 2 539 euros à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, l’arrêt rendu le 18 juillet 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Custom solutions aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de cette société et la condamne à payer à Mme X… la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille quinze. »