Comment l’employeur doit-il démontrer qu’il a satisfait a son obligation de reclassement d’un salarie en inaptitude ?
Si la preuve de l’exécution de l’obligation de reclassement incombe à l’employeur, il appartient au juge, en cas de contestation sur l’existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.
En conséquence, ne méconnaît pas les règles de la charge de la preuve relatives au périmètre du groupe de reclassement, la cour d’appel qui, appréciant les éléments qui lui étaient soumis tant par l’employeur que par le salarié, a constaté que l’employeur n’avait fourni que des informations parcellaires sur la détention du capital de sociétés dont le salarié alléguait qu’elles faisaient partie d’un groupe et a fait ressortir que la permutation du personnel était possible, ce dont elle a déduit que l’employeur ne justifiait pas du respect de son obligation de reclassement.
Dans cette affaire sa posait la question de savoir comment l’employeur peut démontrer qu’il a satisfait à son obligation de reclassement d’un salarié en inaptitude ?
Dans les faits, un salarié, employé en tant que charpentier menuisier, a été victime d’un accident du travail et déclaré inapte à son poste de travail.
Licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement, il a saisi la juridiction prud’homale, invoquant un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement.
Dans un Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 6 novembre 2024, les juges confirment la décision des juges du fond et estime que l’employeur ne satisfait pas à son obligation de reclassement, des lors qu’il ne fournit pas d’éléments suffisants pour démontrer qu’il a effectivement mis en œuvre cette obligation.
Elle ajoute qu’il appartient au juge en cas de contestation sur l’existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.
Cass. soc., 6 novembre 2024, n° 23-15.368, FS-B
Argumentation de la Cour de Cassation
« Réponse de la Cour
5. Si la preuve de l’exécution de l’obligation de reclassement incombe à l’employeur, il appartient au juge, en cas de contestation sur l’existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.
6. La cour d’appel a d’abord constaté que le salarié faisait valoir que la recherche de reclassement aurait dû s’étendre à toutes les sociétés détenues par la holding Gilathelo Investissements et notamment à la société Maisons d’Histoire faisant, selon lui, partie du même groupe et que l’employeur produisait un document d’une page établi par son expert-comptable, dont il ressortait que la société employeur était détenue à 100% par la société le Vaudome, elle-même détenue par la société Gilathelo Investissements à 18,51% et détenait 36,6% dans la société Maisons d’Histoire conjointement avec M. [G], actionnaire majoritaire à 54,4%.
7. Elle a ensuite relevé qu’aucun organigramme des différentes sociétés liées à la holding Gilathelo Investissements n’était produit empêchant de vérifier si, au sein de cet ensemble de sociétés, n’existait pas une entreprise dominante au sens des articles précités, que les informations relatives à la détention du capital des différentes sociétés étaient parcellaires et estimé que l’employeur avait choisi de ne pas fournir ces informations essentielles, alors qu’il était le seul à pouvoir le faire.
8. Elle a enfin relevé que selon les dires non contredits du salarié, la société Ateliers Aubert-Labansat et la société Maisons d’Histoire étaient domiciliées sur le même site et effectuaient des chantiers en commun et que l’employeur n’établissait ni ne soutenait que la permutation du personnel entre ces deux sociétés était impossible.
9. Ayant ainsi fait ressortir que l’employeur n’apportait pas d’éléments suffisants pour déterminer le périmètre du groupe au niveau duquel devait être apprécié le reclassement, la cour d’appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a pu en déduire, en l’état des éléments qui lui étaient soumis tant par l’employeur que par le salarié et sans méconnaître les règles relatives à la charge de la preuve, que l’employeur ne justifiait pas avoir satisfait à son obligation de reclassement dans un périmètre pertinent.
10. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ; »