Ce qu’il faut savoir avant de démisionner pour non respect des obligations de l’employeur

Une démission n’est pas un acte anodin. Elle entraîne des droits, mais aussi des obligations que vous vous devez de respecter. Pesez bien le pour et le contre avant de donner votre démission, et ne le faîtes jamais sur un coup de tête; vous pourriez le regretter par la suite.

Aussi, si votre démission a pour origine le manquement de l’employeur à ses obligations, vous devez imperaivement motiver votre demisison ou la prise d’acte de la rupture de votre contrat par les fautes pretendues de votre employeur ( non paiement des heures supplémantaires, non respect de l’obligation de sécurité, harcelement…)

Vous devez ainsi faire acter le caractere équivoque de votre démision.

La règle est établie depuis longtemps : pour qu’elle soit valable en tant que telle, une démission ne peut résulter que d’une manifestation claire et non équivoque de la volonté de rompre le contrat de travail (Cass. soc., 21 mai 1980, no 78-41.833 ; Cass. soc., 9 mai 2007, no 05-40.315, JSL, 12 juin 2007, no 213-4).


La démission doit donc être le fruit d’une décision libre et réfléchie et ne peut être le résultat du comportement de l’employeur.

Dans le cas contraire, le salarié est en droit de revenir sur cette démission et d’en contester la validité ou la portée devant la juridiction prud’homale. Deux types de griefs peuvent fonder une telle action.


D’abord, le salarié peut, se fondant sur le droit commun, invoquer un vice du consentement – la violence, l’erreur et le dol – pour demander l’annulation de sa démission (C. civ., art. 1109).

Ainsi, la volonté de démissionner est considérée comme équivoque si elle a été altérée par la mise en oeuvre de manoeuvres dolosives par l’employeur (Cass. soc., 22 mai 2002, no 00-41.708) ou si elle a pour source une erreur du salarié (Cass. soc., 13 juill. 2004, no 02-45.302). De même, des contraintes de la part de l’employeur pouvant être qualifiées de violence morale affectent la validité d’une démission (Cass. soc., 13 nov. 1986, no 84-41.708).


Ensuite, sans invoquer un vice du consentement, le salarié peut demander la requalification de sa démission en une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail du fait de manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles.

En pareil cas, si la démission a été donnée sans réserve, le juge devra rechercher si des circonstances antérieures ou contemporaines à la rupture la rendent équivoque (Cass. soc., 19 déc. 2007, no 06-42.550), cette solution est donc à eviter cer il sera ensuite mal aisé de faire caracteriser par les juges une situarion de démision équivoque puisuqe non motivée par les agissements de l’employeur.


Par un arrêt du 17 mars 2010, les Hauts Magistrats ont jugé qu’un salarié ne peut à la fois invoquer un vice du consentement pour obtenir la nullité de sa démission et soutenir que cette démission doit s’analyser en une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur (Cass. soc., 17 mars 2010, no 09-40.465, JSL, 3 juin 2010, no 278-3). Arrêt confirmé le 7 mars 2012.


Le juge prud’homal sera lié par l’argumentation du salarié

En l’espèce, les salariés avaient bien fondé principalement leurs demandes sur un vice du consentement.


Mais, en même temps, ils faisaient référence à de multiples manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles (non-paiement d’heures supplémentaires, non-application de la convention collective…).

C’est dans ces conditions que les juges du fond, après avoir constaté l’absence de contrainte, ont décidé de requalifier la démission en prise d’acte, après avoir constaté que des circonstances antérieures ou contemporaines la rendaient équivoque.


Dans son arrêt du 7 mars 2012, non seulement la Cour de cassation rappelle que le salarié doit choisir entre vice du consentement ou prise d’acte, mais elle énonce que le juge prud’homal est lié par ce choix.


Si le salarié invoque un vice du consentement, les juges du fond doivent s’en tenir à ce fondement, et se contenter de rechercher l’existence ou non de ce vice.


Soit le vice est avéré et la démission est annulée. Soit, comme en l’espèce, il apparaît que le consentement des salariés démissionnaires n’a pas été vicié, et la démission sera réputée comme résultant d’une volonté claire et non équivoque.

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Cass. soc., 7 mars 2012, pourvoi no 09-73.050,

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu selon l’arrêt attaqué, que MM. X…, Y…, Z…, A…, Alain B…, Yves B…, C… et D… ont été engagés en qualité de chauffeurs par la société Gad, dont l’activité est l’abattage, la transformation et la distribution de porcs ; qu’à la suite de la décision de la société Gad de supprimer son service transport, les salariés susnommés, à l’exception de M. D…, ont donné leur démission entre juin 1998 et janvier 1999 ; que soutenant qu’ils n’avaient pas été remplis de leurs droits et, pour ceux d’entre eux ayant démissionné, que leur démission devait produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les salariés, ainsi que le syndicat Agro du Pays de Morlaix, ont saisi la juridiction prud’homale de demandes en paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire ; qu’à la suite du décès de Bernard Z…, les consorts Louis-Alexandre, Gisèle, Jean-Yves et Solange Z… ont repris l’instance ;
Sur le pourvoi en ce qu’il concerne M. A… :
Attendu qu’aucun moyen n’étant dirigé à l’encontre de M. A…, il y a lieu de le mettre hors de cause ;
Sur le premier moyen dirigé à l’encontre de M. D… :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le deuxième moyen en ce qu’il est dirigé à l’encontre de MM. X…, Y…, C…, Alain B…, Yves B… et les ayants droit de Bernard Z… :
Vu les articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail ;
Attendu que pour dire que les démissions de MM. X…, Y…, Z…, C…, Alain B… et Yves B… produisent les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient que les salariés soutiennent que leurs démissions, données sous la contrainte de leur employeur, sont entachées d’un vice du consentement et donc équivoques ; que cependant il résulte des pièces produites que les démissions des salariés ont été mûrement réfléchies et que le vice du consentement allégué n’est pas établi ; que toutefois lorsqu’un salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à l’employeur, le juge doit, si cette démission était équivoque, l’analyser en une prise d’acte ; qu’en l’espèce l’application défectueuse de la convention collective applicable, le non-paiement de nombreuses heures supplémentaires, la non-communication des disques constituent des manquements de la société Gad ; que l’application de la convention collective et le temps de travail effectif étaient en litige entre les parties lorsque les démissions ont été adressées, elles-mêmes suivies quelques semaines plus tard de la saisine du conseil des prud’hommes sur ces difficultés ; que dès lors les démissions sont équivoques et s’analysent en prises d’acte ; que les manquements de l’employeur étant avérés et justifiant la rupture des relations contractuelles, les démissions doivent produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses énonciations que les salariés arguaient du caractère équivoque de leur démission, non à raison de l’existence d’un différend antérieur ou concomitant de leur démission, susceptible de l’analyser en une prise d’acte, mais au motif de la contrainte ayant vicié leur consentement, contrainte qu’elle a jugée non établie, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les troisième et quatrième moyens :
Met hors de cause M. A… ;
CASSE ET ANNULE,

Cass. soc., 7 mars 2012, pourvoi no 09-73.050,