Reprise d’activité dans le cadre d’une perte de marché : le contrat de travail est-il transféré vers le nouvel employeur ?

Un arrêt du 17 janvier 2024 (n° 22-20.435 F-D) relève que perte de marché n’est pas suffisante pour entrainer, par elle-même, l’application de l’article L. 1224-1 du Code du travail et le transfert du contrat de travail.

 

« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. »

 

La Cour de cassation a jugé que si la perte d’un marché n’entraine pas l’application de cet article, il en va autrement lorsque le changement de prestataire s’accompagne du transfert des moyens d’exploitation nécessaires à la poursuite de l’activité d’une entité économique autonome.

 

En l’espèce, une salariée avait été embauchée par la Fondation en qualité de cuisinière par contrats à durée déterminée du 13 juin 2016 au 24 décembre 2017.

 

En 2018, la Fondation a signé avec la Société Mille et un repas un contrat de prestation « de restauration d’assistance technique ».

 

La Société Mille et un repas a embauché la même salariée pour les mêmes fonctions à partir du 15 janvier 2018. Il était alors prévu que la salariée exerce ses prestations de restauration au sein de la Fondation en utilisant les locaux et le matériel de celle-ci.

 

Finalement, la Société a perdu le marché conclu avec la Fondation.

La Société alors employeur de la salariée, transfère son contrat de travail à compter du 1er février 2019 à la Fondation. La salariée a contesté le transfert de son contrat de travail.

 

Elle a saisi la juridiction prud’homale afin de déterminer qui était son employeur ainsi que d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

 

 

La Cour d’appel constate que l’activité de restauration de la Fondation relevait au sein de la Société Mille et un repas d’un ensemble organisé de personnes spécialisées dans cette activité, la salariée ayant été recrutée pour occuper le poste de cuisinière et uniquement affectée à cette activité de restauration et de moyens techniques spécifiques nécessaires à son exerce mis à la disposition du prestataire par la Fondation.

 

De plus, celle-ci avait repris, à compter du 1er février 2019, l’activité de restauration avec les mêmes moyens d’exploitation corporels et incorporels indispensables à la poursuite de l’activité, la Cour d’appel a pu en déduire le transfert d’une entité économique autonome et a exactement retenu que le contrat de travail de la salariée affectée à cette activité s’était poursuivi de plein droit avec la Fondation.

 

La Cour d’appel considérait donc que le transfert avait eu lieu et donc que la Fondation, devenue employeur de la salariée, devait s’acquitter des dommages et intérêts dus à la salariée en raison de la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

 

La Fondation forme alors un pourvoi en cassation.

 

La Cour de cassation confirme la décision rendue par la Cour d’appel et considère que la perte d’un marché ne justifie pas à elle seule un transfert des contrats de travail mais qu’il convient de vérifier si les conditions légales prévoyant le transfert de contrat de travail ne sont pas remplies.

 

Elle rappelle donc qu’il faut vérifier s’il y a transfert d’une entité économique autonome.

En l’espèce, c’est bien le cas, le contrat de travail de la salariée a donc bien été transféré à compter du 1er février 2019 à la Fondation.

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 janvier 2024, 22-20.435