Questions-Réponses autour de la présomption de démission en cas d’abandon de poste

Questions-Réponses autour de la présomption de démission en cas d’abandon de poste

 

Depuis le décret du 17 avril 2023, le salarié parti volontairement sans justification est réputé démissionnaire, s’il ne reprend pas le travail dans les quinze jours qui suivent la réception de la mise en demeure envoyée par l’employeur, sans avoir de motif légitime.

 

La privation d’emploi devenant alors volontaire, il perd ses droits aux allocations de chômage.

 

Voulant renforcer la dissuasion, le décret invite l’employeur à rappeler au salarié qu’il est alors débiteur du préavis de démission.

 

Cette  présomption de démission, créée par la loi sur le marché du travail, répond à un objectif clairement affiché : priver les salariés abandonnant leur poste de travail du droit à l’assurance chômage.

Pour autant, sa mise en œuvre est suspendue à des conditions précises.

Le ministere du Travail a publié des questions / reponses venant preciser certains  points du decret.

L’employeur est-il obligé d’envoyer une mise en demeure si son salarié est en abandon de poste ?

Non, l’employeur peut décider de ne pas mettre en demeure son salarié qui a abandonné volontairement son poste. Dans ce cas, l’employeur conserve le salarié dans ses effectifs. Le contrat de travail du salarié n’est pas rompu mais seulement suspendu ; la rémunération du salarié n’est donc pas due.

 

A contrario, si l’employeur désire mettre fin à la relation de travail avec le salarié qui a abandonné son poste, il doit mettre en œuvre la procédure de mise en demeure et de présomption de démission. Il n’a plus vocation à engager une procédure de licenciement pour faute.

 

Que doit préciser l’employeur dans la mise en demeure ?

 

L’employeur doit obligatoirement indiquer dans sa mise en demeure le délai dans lequel le salarié doit reprendre son poste Il doit également demander la raison de l’absence du salarié afin de recueillir la justification de cette absence.

 

Le délai donné au salarié pour reprendre son poste ne doit pas être inférieur à 15 jours, qu’il faut entendre comme calendaires (c’est-à-dire week-end et jours fériés compris) à compter de la présentation de la lettre recommandée ou de la lettre contre remise en main propre.

 

L’employeur doit également rappeler que passé ce délai, faute pour le salarié d’avoir repris son poste, ce dernier sera présumé démissionnaire.

 

L’employeur peut préciser dans la mise en demeure les conséquences du refus du salarié de reprendre son poste dans le délai fixé par l’employeur : le salarié sera considéré comme démissionnaire et n’aura pas droit aux allocations de l’assurance chômage.

 

Il est également recommandé que l’employeur précise dans la mise en demeure que le salarié qui ne reprendrait pas son poste au plus tard à la date fixée est redevable d’un préavis, et ainsi qu’il prévoie l’organisation de l’exécution de ce préavis. L’employeur peut également rappeler que le silence du salarié sur l’organisation de l’éventuel préavis peut constituer de la part du salarié une manifestation de son refus d’exécuter le préavis.

 

Que faire si l’employeur ne reçoit pas la preuve de la réception de la mise en demeure adressée au salarié ?

 

Comme pour la convocation à l’entretien préalable au licenciement, l’envoi de la mise en demeure par lettre recommandée permet de prévenir toute contestation sur la date de remise de la mise en demeure. Aussi, si le salarié refuse de prendre connaissance de la mise en demeure, cette dernière est quand même notifiée régulièrement dès lors qu’elle a bien été présentée au domicile du salarié.

Il en va de même si le salarié, par négligence, n’a pas fourni à son employeur la bonne adresse de son domicile.

Il est recommandé à l’employeur quand il veut mettre en demeure son salarié de le faire par lettre recommandée avec accusé de réception, afin d’éviter au maximum toute contestation sur la date de présentation de la mise en demeure.

 

Quels sont les motifs d’abandon de poste pour lesquels la procédure de présomption de démission ne doit pas être conduite à son terme ?

 

Si le salarié répond à la mise en demeure de son employeur en justifiant son absence à son poste de travail par un motif légitime, la procédure permettant de présumer d’une démission ne doit pas être conduite à son terme.

 

En outre, l’employeur doit veiller à protéger les salariés qui peuvent, à cette occasion, faire état d’une situation de danger, et ne pas mener dans ce cas la procédure de présomption de démission à terme.

 

Par exemple, si le salarié avance l’existence d’un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé, il est en droit d’exercer son droit de retrait, prévu à l’article L. 4131-1 du code du travail, et son absence est légitime. Par suite, la procédure de présomption de démission ne trouvera pas à s’appliquer.

 

Il en va de même si l’absence du salarié est justifiée par son état de santé et qu’il s’est absenté pour consulter un médecin qui lui a prescrit un arrêt de travail pour le jour même. Le salarié devra fournir dans ce cas le certificat médical daté du jour de son abandon de poste. Dans ce cas, au vu du justificatif fourni, la procédure de présomption de démission ne trouvera pas à s’appliquer.

 

Le mécanisme de présomption de démission ne doit pas s’appliquer non plus lorsque le salarié est gréviste au sens de l’article L. 2511-1 du code du travail, lorsque le salarié est absent parce qu’il refuse d’exécuter une instruction contraire à une réglementation, ou lorsqu’une modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur est refusée par le salarié.

 

Quelles sont les conséquences si le salarié ne répond pas à la mise en demeure, ou répond qu’il ne souhaite pas reprendre son poste ? À partir de quel moment le salarié est-il considéré comme démissionnaire ?

 

Si le salarié ne répond pas à la mise en demeure et ne reprend pas le travail au plus tard à la date fixée par l’employeur, il sera présumé démissionnaire. La démission du salarié sera constatée à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur.

 

Si le salarié répond à la mise en demeure de son employeur qu’il ne reprendra pas son travail dans l’entreprise, il sera également considéré comme démissionnaire à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur.

 

Si une convention collective prévoit que la démission du salarié doit se faire par écrit, cette exigence s’applique-t-elle dans le cadre de la présomption de démission en cas d’abandon de poste volontaire du salarié ?

 

La démission n’est soumise à aucun formalisme légal. Elle peut donc se faire par écrit ou oralement, pourvu qu’elle se manifeste de façon claire et non-équivoque. Si des conventions collectives imposent un écrit produit par le salarié pour manifester sa volonté de démissionner, la jurisprudence de la Cour de cassation a estimé que ce type de dispositions n’institue qu’une règle de forme dont la méconnaissance ne remet pas en cause la décision du salarié.

 

Dans le cas précis de la présomption de démission en cas d’abandon de poste du salarié, l’employeur n’est donc pas obligé de demander à son salarié qui ne s’est pas manifesté suite à la mise en demeure de produire un écrit pour formaliser sa démission.

 

Cependant, afin d’assurer une meilleure lisibilité de cette articulation, il est recommandé de mettre à jour les conventions collectives afin de prévoir explicitement que l’exigence d’une démission exprimée par écrit ne s’applique pas dans le cadre de présomption de démission en cas d’abandon de poste volontaire du salarié prévue à l’article L. 1237-1-1 du code du travail.

 

Un préavis est-il dû par le salarié présumé démissionnaire ?

 

Si le salarié n’a pas répondu à la mise en demeure de l’employeur l’enjoignant de reprendre son poste ou qu’il a répondu par la négative à cette mise en demeure, il est présumé démissionnaire. Dès lors, les règles de droit commun s’agissant du préavis en cas de démission s’appliquent.

 

Aussi, un préavis de démission est dû si des dispositions législatives ou conventionnelles le prévoient. A défaut de stipulations législatives ou contractuelles, les usages pratiqués dans la localité et la profession peuvent en prévoir. Sinon, aucun préavis n’est dû.

 

Quelles sont les modalités d’exécution du préavis de démission ?

 

Conformément au droit, le salarié à qui l’employeur demande d’exécuter son préavis de démission doit s’y conformer. Dans ce cas, le salarié exécute normalement son travail jusqu’à l’expiration du préavis. Si le salarié n’exécute pas son préavis, l’employeur peut lui demander une indemnité compensatrice correspondant aux sommes que le salarié aurait perçues s’il avait exécuté son préavis.

Il est probable que dans le cas d’un salarié en abandon de poste et qui n’a pas répondu à la mise en demeure de son employeur, le salarié refusera d’exécuter son préavis. Dans cas, le préavis ne sera pas exécuté et l’employeur n’aura pas d’indemnité compensatrice à verser au salarié.

 

Le préavis de démission peut également ne pas être exécuté dans deux autres situations :

  • L’employeur peut dispenser son salarié d’exécuter son préavis, ce dernier devant percevoir dans ce cas une indemnité compensatrice correspondant aux salaires qu’il aurait perçus s’il avait pu exécuter son préavis ;

  • L’employeur et le salarié peuvent se mettre d’accord pour que le préavis ne soit pas exécuté : dans cette situation, aucune indemnité compensatrice n’est due ; la mise en demeure adressée par l’employeur au salarié peut dans ce cas servir de point de départ à la conclusion d’un tel accord.

Quel est le point de départ du préavis de démission ?

 

Le préavis de démission commence à courir à compter du jour ultime fixé par l’employeur pour la reprise du travail de son salarié en abandon de poste. Ce jour est fixé dans la mise en demeure qu’a adressée l’employeur à son salarié.

 

Pour aller plus loin : presomption-de-demission-en-cas-dabandon-volontaire-de-poste