QUELLE PRESCRIPTION POUR LA FAUTE INEXCUSABLE DE L’EMPLOYEUR ?

Constitue une faute inexcusable de l’employeur tout manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers son salarié.

 

Un tel manquement est caractérisé lorsque celui-ci n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié de la survenance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors même qu’il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé.

 

Par ailleurs, la chambre sociale de la Cour de cassation a pu considérer que :

 

« dans le cadre d’un accident du travail, un employeur ne commet pas de faute inexcusable s’il ne pouvait avoir une conscience pleine et entière du risque auquel sa salariée était exposée. » (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 9 décembre 2021, 20-13.857)

 

Afin de faire reconnaitre la faute inexcusable de son employeur, il est nécessaire de saisir le tribunal judiciaire d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable qui est soumise à un délai de prescription de deux ans selon l’article L 431-2 du Code de sécurité sociale.

 

Au sein du Code de la sécurité sociale il est également précisé que plusieurs points de départ de ce délai peuvent être applicables :

 

  • Pour les accidents du travail, prescription à compter du jour de l’accident ou de la cessation du paiement des l’indemnités journalières accident du travail (donc pas les indemnités journalières maladie pour la même pathologie) ;

 

  • pour les maladies professionnelles, à compter de la date de la première constatation par le médecin traitant de la maladie ou de la date de cessation du paiement des indemnités journalières en maladie professionnelle.

 

Il est également intéressant de préciser que le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable est interrompu par l’exercice d’une action pénale ou par l’action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie.

 

Jusqu’à récemment l’article 2241 du Code civil interdisait qu’une action prud’homale (donc devant le Conseil de prud’hommes) ait un effet sur la prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable.

 

A ce titre, la Haute Juridiction précisait que :

 

« Qu’ayant ainsi fait ressortir à bon droit que les deux actions successivement engagées par M. X… ne tendaient pas à un seul et même but, de sorte que la première n’avait pas interrompu le délai de prescription de l’action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, la cour d’appel a exactement déduit que celle-ci était atteinte par la prescription ; » (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 6 juillet 2017, 16-22.243)

 

Néanmoins la Cour de cassation semble avoir changé sa jurisprudence dans un arrêt en date du 7 juillet 2022 en indiquant que :

 

« De ces constatations et énonciations, dont il résultait que les deux actions tendaient, au moins partiellement, à un seul et même but, la cour d’appel a exactement déduit que l’action prud’homale engagée par la victime avait interrompu la prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. » (Cass. civ. 2, 07-07-2022, n° 20-21.294, F-D, Rejet)

 

La Haute Juridiction semble donc pouvoir permettre au salarié qui a une instance pendante devant le CPH de pouvoir bénéficier de l’interruption de la prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dans la mesure où est mise en cause l’obligation de sécurité de l’employeur.

 

Cette jurisprudence concernait un harcèlement moral, néanmoins les termes utilisés par la Cour de cassation laissent supposer que ce raisonnement pourrait être applicable à d’autres situations.

 

Cette jurisprudence mérité tout de même d’être confirmée sur d’autres situations permettant d’établir la suspension de la prescription.

 

 Pour aller plus loin :