Prescription des faits fautifs : quel point de départ ?

 

La Cour de cassation s’est prononcée le 8 décembre 2021 à propos de la prescription des faits fautifs et est venue rappeler le principe selon lequel même s’ils ont été commis plus de 2 mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires, les faits fautifs invoqués ne sont pas prescrits dès lors que l’employeur n’avait pas eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des griefs imputés au salarié.

 

Pour rappel, aucun fait fautif ne peut en principe donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance selon l’article L1332-4 du code du travail. (Cass. soc., 23-03-2004, n° 01-47.342)

 

Ainsi, le point de départ de ce de délai de 2 mois ne court que lorsque l’employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié.

 

Passé ce délai, l’employeur ne pourra plus reprocher au salarié la réalisation de ces faits contestés sauf s’il parvient à démontrer qu’il n’a eu connaissance des faits fautifs que dans les 2 mois avant la mise en œuvre de la procédure. (Cass. soc., 29-01-2003, n° 01-40.036)

 

Dans les deux arrêts du 8 décembre 2021 la Cour de cassation est venue apporter des précisions sur le point de départ de ce délai.

 

A ce titre, elle juge que même s’ils ont été commis plus de 2 mois avant l’engagement des poursuites disciplinaires, les faits fautifs invoqués ne sont pas prescrits dès lors que l’employeur n’a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des griefs imputés au salarié qu’à la suite du compte-rendu de l’enquête diligentée par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

 

Dans une telle hypothèse, le délai de prescription de deux mois ne commence alors à courir qu’à compter de la communication de ce compte-rendu d’enquête. (Cass. soc., 8 décembre 2021, n°20-15.798 F-D)

 

Dans un second arrêt elle vient préciser que lorsque l’employeur n’a eu une connaissance exacte de la nature, de la réalité et de l’ampleur des irrégularités relatives aux remboursements de frais professionnels reprochées au salarié qu’à l’occasion de l’enquête réalisée lors de la demande de remboursement, en janvier, d’une facture d’hôtel pour un séjour non professionnel de l’intéressé, la poursuite disciplinaire engagée en février n’est pas prescrite, même si l’enquête a révélé une pratique répétitive depuis le mois de septembre précédent. (Cass. soc., 8 décembre 2021, n°20-15.622 F-D).

 

 

 

Cass. soc. 8-12-2021 n° 20-15.798 F-D

 

« Réponse de la Cour

 

4. Ayant constaté que l’employeur n’avait eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des griefs imputés au salarié qu’à la suite du compte-rendu de l’enquête diligentée à compter du 8 septembre 2008 par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la cour d’appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a exactement décidé que les faits fautifs invoqués par l’employeur n’étaient pas prescrits lors de l’engagement des poursuites, le 24 octobre 2008. 

 

5. Ayant ensuite relevé que l’intéressé avait tenu, lors d’une réunion de direction, des propos injurieux et offensants à l’égard d’une salariée, Mme [NZ], de nationalité italienne, en lui disant « comment dit-on lèche-cul en italien ? Et bien ça se dit [NZ] », la cour d’appel a pu en déduire que ces propos constituaient un abus de la liberté d’expression du salarié rendant à eux seuls impossible son maintien dans l’entreprise.

 

6. Le moyen n’est donc pas fondé. «